Ramener les fils et les filles d’Israël à la maison, l’Histoire attendra
Société
Publié le 3 février 2025
Eden Levi Campana (LPH INFO)
Il est des guerres qui se gagnent dans le fracas des armes, d’autres dans le silence des stratèges. Il est des triomphes que l’histoire clame, d’autres que seul le temps consacre. Et il est des victoires qui, à force d’être méconnues, se travestissent en défaites aux yeux du profane. Israël, cet État au carrefour des orages, sait la leçon des siècles : résister n’est pas céder, plier n’est pas rompre, concéder n’est pas perdre.
Les otages reviennent, mais à quel prix. Les images fusent, crues, insoutenables, exhibant l’échange comme une rançon de la honte. On montre, on commente, on dénonce. On voudrait croire que l’humiliation équivaut à la défaite, que la concession s’apparente à l’échec. Mais ce n’est qu’une illusion, un jeu d’ombres où la faiblesse prêtée n’est que stratégie, où la perte apparente dissimule l’avance réelle.
Car Israël sait. Israël voit. Israël prévoit. Loin des cris, loin des lamentations, loin des gesticulations éphémères, il trace sa route. Qui croit l’égarer se trompe. Qui croit l’abattre se fourvoie. Ce peuple, forgé dans l’exil et trempé dans l’épreuve, ne cède rien d’essentiel.
Il y a dans la guerre une illusion du temps. Ce que l’on célèbre aujourd’hui comme un succès sera demain un mirage dissipé ; ce que l’on méprise aujourd’hui comme une faiblesse sera demain le socle d’une résolution inébranlable. Telle est la grammaire des conflits, où la ponctuation d’un instant ne saurait prédire l’épilogue.
Israël sait où il va, et ceux qui s’arrêtent au vacarme du présent ne perçoivent pas la mélodie du futur. L’histoire ne s’écrit pas avec des cris, mais avec des actes. Et les actes, Israël les pose, inexorablement, implacablement, irrévocablement. Qui douterait de sa victoire ne comprendrait pas son silence.
Il y a trois temps : le temps militaire, le temps diplomatique et le temps des médias. Le premier est celui des stratèges, des généraux, des opérations qui se réfléchissent dans l’ombre. Le second est celui des négociations, des alliances tissées dans la patience, où un mot pèse parfois plus qu’une armée. Le dernier est celui de l’immédiateté, du bruit, de l’éphémère. La Torah enseigne que l’événement ne se juge pas à l’instant mais à l’échelle du temps divin. « Il y a un temps pour tout, un temps pour chaque chose sous les cieux » (Ecclésiaste 3:1).
La patience est la force cachée de ceux qui croient. Abraham a attendu son fils, Moïse a marché quarante ans dans le désert, les prophètes ont prêché sans voir le fruit de leur parole. Israël sait que l’épreuve est une forge, que le délai n’est pas une punition, mais un prélude. « Ceux qui espèrent en l’Éternel renouvellent leur force » (Isaïe 40:31). C’est dans l’attente que se fortifie la résilience.
La ruse. L’intelligence. La finesse d’esprit face aux labyrinthes bureaucratiques, aux chaînes administratives, aux murs de défiance. Israël, nation de l’inattendu, a toujours su transformer les obstacles en opportunités, les interdits en tremplins, les impasses en portes dérobées.
On croyait les Vedettes de Cherbourg cadenassées, emprisonnées dans le port normand, scellées sous l’œil impassible des autorités françaises. Mais croire n’est pas savoir, et savoir sans comprendre, c’est ignorer le génie qui s’immisce entre les failles du destin. Un vent de nuit, un vent d’exil, un vent de ruse souffla sur les eaux. En une nuit, en une marée, en un miracle, les vedettes s’évanouirent dans l’infini marin.
Et que dire de l’affaire des beepers ? Cet autre stratagème, cet autre coup d’éclat où le bruit discret des ondes enterra le vacarme des soupçons. Une sonnerie, un signal, une fréquence que l’on croyait anodine et qui, soudain, orchestre le triomphe du renseignement.
Israël ne gagne pas (que) par la force brute. Israël ne triomphe pas (que) par le fracas des armes. Israël avance avec détermination, murmure à l’oreille du vent, modèle l’avenir comme un sculpteur façonne l’argile. Ruse et sagesse, stratagème et réflexion, silence et éclat. Telle est la signature d’un peuple qui ne recule pas, mais qui avance toujours, là où d’autres ne voient que l’impossible, nous voyons le miracle d’Israël.
L’Histoire, dans son écriture labyrinthique, ne se laisse jamais enfermer dans l’instant. Tout semble factice, simulacre, illusion fugace. Alors qu’importe le bruit, qu’importe l’illusion, qu’importe l’impatience du monde consumériste. Il est une seule chose qui vaille aujourd’hui : ramener les otages. Peu importe les opinions volatiles, les indignations superficielles, les leçons dispensées par ceux qui n’ont jamais connu l’épreuve. Peu importe les discours, les gesticulations, les injonctions pressées. Car il est un commandement plus haut, plus absolu, plus impératif que tout : ramener les fils et les filles d’Israël à la maison.
Au-delà des stratégies, des luttes et du temps qui s’étire, il est une urgence qui dépasse tout, le dire et le dire encore : ramener les otages à la maison maintenant. Car il est un commandement plus absolu que tous les autres : « Pidyion Chévouïm », la rédemption des captifs. Sauver une vie, c’est sauver un monde. Tant qu’un seul reste enchaîné, le temps lui-même s’arrête, suspendu à cette exigence sacrée.
Et le reste ? Plus tard. Le reste, une autre fois. L’Histoire, elle, attendra.