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La lutte juridique contre l’antisémitisme en France passe à la vitesse supérieure

Contributions

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Maître Julie Daniel (Ynet)

La vague antisémite dans le pays, qui se dissimule souvent sous le couvert d’antisionisme, rencontre désormais l’opposition de juristes avocats et de politiciens qui condamnent et luttent fermement contre ce phénomène. Parmi les actions entreprises, une nouvelle proposition de loi, sans précédent, a été mise en avant et déposée à l’assemblée nationale pour faire face à cette situation.
Face à la vague de déclarations antisémites déguisées en critiques de la politique « israélienne » parmi les membres de partis politiques français, et dans le contexte de la banalisation des accusations contre Israël et les Juifs de France depuis le 7 octobre, des juristes et politiciens français ont décidé de contre-attaquer par la voie législative au Parlement.

Alors que le président français Emmanuel Macron a lui-même tenté à deux reprises d’empêcher la participation de sociétés israéliennes à deux salons d’équipements militaires en France (le dernier salon sur les équipements maritimes militaires se tenant cette semaine), des avocats et personnalités publiques françaises ont porté l’affaire devant le tribunal de commerce en France. La justice a démontré que, selon le droit français, aucun responsable politique n’a le pouvoir ni le droit de discriminer sur la base de la nationalité en violation de la loi, et de contrevenir aux principes fondamentaux du droit français et européen.

Les tentatives d’Ofer Bronstein, le conseiller franco-israélien du président en charge des affaires du Moyen-Orient, pour apaiser les tensions en minimisant et en réinterprétant les déclarations d’Emmanuel Macron n’ont pas convaincu les avocats ni les militants politiques. Ces derniers ont déjà saisi le système judiciaire, demandant de mettre fin à de ces atteintes flagrantes aux principes fondamentaux du droit français de la part du président.

De nouvelles formes d’antisémitisme

Cette bataille juridique a réellement débuté le 7 octobre dans l’espace public, menée par les avocats français de l’organisation «Action Avocats»  ainsi que dans les sphères culturelles, médiatiques et littéraires, notamment avec les positions de lutte contre ce fléau de l’écrivaine iranienne Moran Jaffarian et de l’écrivaine Rachel Khan.
Aujourd’hui, cette lutte atteint enfin le cœur de la démocratie française : le Parlement.

Cette semaine, Caroline Yadan, députée représentant les Français résidents à l’étranger, de la 8 e circonscription , y compris en Israël, et membre de la commission des lois du Parlement, a officiellement déposé une proposition de loi visant à lutter contre toutes les formes dissimulées d’antisémitisme, y compris la haine d’Israël.
Cette loi vise à mettre un terme aux propos, déclarations, articles ou écrits publics dirigés contre Israël ou incitant à la haine d’Israël, lesquels sont en réalité une forme dissimulée d’antisémitisme.

Dans le préambule de cette proposition, Yadan rappelle l’augmentation significative des actes antisémites depuis le début du conflit (57 % des actes racistes en France visent la communauté juive, bien que celle-ci ne représente qu’un pour cent de la population). Ce préambule souligne que ces actes nuisent aux fondements mêmes de la République, constituent une atteinte grave à la démocratie et à l’État de droit, et replongent la France dans des périodes sombres de son histoire.

Il est également mentionné qu’une étude menée par l’organisme public Fondation des droits fondamentaux révèle que 87 % des Juifs en France se sentent aujourd’hui contraints de dissimuler leur identité. Derrière ces chiffres se cache une réalité inquiétante : la normalisation de l’antisémitisme s’immisce dans la mentalité collective et se propage rapidement, en particulier parmi les jeunes générations.
Ainsi, explique le préambule, aujourd’hui, la haine dirigée contre les Juifs en France découle d’une haine persistante et viscérale envers Israël, perçue comme un État illégitime, accusé des crimes les plus graves.
Le préambule évoque l’émergence en France d’une nouvelle forme d’antisémitisme, fondée sur la haine d’Israël, qualifiée de « nouvel antisémitisme géopolitique ».

Il est précisé également que ce nouvel antisémitisme, qui décrit Israël (et ses citoyens) comme un État nazi, suscite une haine obsessionnelle , viscérale , appelant à la destruction d’Israël et de ses citoyens, constitue en somme la source de la violence et des délits envers les Juifs en France.

« L’appel à la destruction d’Israël en tant que régime nazi – qui s’enracine dans la mentalité collective en France – se retrouve également dans la doctrine du Hamas et du Hezbollah, » est-il écrit. « En tant que représentants du parlement français, nous avons le devoir de nous demander comment et où combattre cet antisémitisme moderne, que ce soit dans les écoles, sur les réseaux sociaux ou dans la vie politique, alors même que des membres du parlement n’hésitent pas aujourd’hui à exprimer publiquement cette haine. »

Le préambule de la proposition de loi rappelle que la lutte contre l’antisémitisme moderne a débuté en 2019 lorsque les représentants du parlement ont adopté la définition de l’antisémitisme telle qu’énoncée par l’*Alliance internationale pour la mémoire de l’Holocauste (IHRA). Selon cette définition : « L’antisémitisme est une certaine perception des Juifs qui peut se manifester par de la haine à leur égard. Les manifestations rhétoriques et physiques de l’antisémitisme visent les individus juifs ou non juifs et/ou leurs biens, les institutions communautaires et les lieux de culte. »

Le préambule cite également des exemples illustrant cette définition, tels que les attaques contre Israël, présentée comme une communauté juive, ou les comparaisons entre la politique actuelle de l’État d’Israël et celle de l’Allemagne nazie. « Cette adoption n’est pour l’instant qu’une recommandation et n’a pas été intégrée dans la loi française, mais la situation actuelle nécessite que cette définition soit inscrite dans la législation, renforçant ainsi l’arsenal juridique du code pénal français. »

Les articles de la proposition de loi

Article 1 : La première disposition de la loi propose une modification du code pénal, faisant de toute provocation directe ou indirecte une infraction pénale, y compris les déclarations publiques présentant des actes de violence ou d’hostilité, ou encore des actes terroristes, sous un jour favorable ou les encourageant.

Article 2 : Le deuxième article crée une nouvelle infraction pénale : la provocation à la destruction ou l’encouragement au déni de l’existence d’un État, ou l’incitation publique à sa destruction ou au déni de son existence en tant qu’État.

Article 3 : Cet article ouvre la possibilité pour les associations de prendre part comme partie plaignante dans des procédures pénales pour des infractions antisémites ou des provocations incitant à la destruction ou au déni de l’existence d’un État spécifique.

Article 4 : Ce dernier article élargit et précise l’infraction pénale de négation de l’Holocauste, en modifiant la définition de crime contre l’humanité pour inclure même une tentative de destruction par une organisation ou un parti (par exemple, le régime de Vichy). Il stipule que toute affirmation ou déclaration visant à minimiser l’ampleur de l’Holocauste, ou à en banaliser la gravité, constitue désormais une infraction pénale.

Cette proposition de loi, présentée par Yadan, a été signée par 90 personnalités influentes en France, y compris des politiciens de haut rang et même d’anciens présidents ou Premiers ministres de tous horizons politiques, parmi eux François Hollande ancien président (parti de gauche), Élisabeth Borne, ancienne Première ministre sous Macron, et bien d’autres. Le président de la Commission des lois de l’Assemblée nationale lui-même a également signé la proposition.

Cette initiative doit bien sûr passer par une première et une deuxième lecture au Parlement, et il est probable que les représentants de la gauche radicale, du parti LFI, comme Aymeric Caron et Jean-Luc Mélenchon, dont certains encouragent eux-mêmes la haine envers Israël, proposeront des amendements. Cependant, cette étape représente une avancée sans précédent dans la vie politique française, au cœur du Parlement, où se dessine une bataille juridique voir constitutionnelle de grande importance, notamment pour les Israéliens.

Article réalisé en collaboration avec le site juridique israélien PsakDin
Maître Julie Daniel, avocate spécialisée en nationalité française et israélienne , droit français et droit européen
daniel.julie.adv@gmail.com

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