Histoire de Nicolas Donin de la Rochelle et le procès du Talmud (Par William Arfi)
Contributions
Publié le 25 août 2023
En l’an 4981 du calendrier hébraïque, soit en 1220 de l’ère chrétienne, était venu de la Rochelle à Paris, un jeune juif nommé Aaron, pour étudier à la Yéchiva de Meaux, sous la direction d’un maître du Talmud, le Rabbin Yehiel de Paris.
Cet étudiant fut mis au ban de la Communauté par ce Rabbin, en 1225, pour avoir mis en doute, à plusieurs reprises la validité de la Thora orale.
Après 10 ans de vie en dehors de la communauté juive, par vengeance il se convertit au christianisme et devient moine franciscain. Il choisit le nom de Nicolas à son baptême, Nicolas Donin, appelé Nicolas de La
Rochelle.
Avant son exclusion, il s’était marié à une belle juive de sa communauté nommée Déborah, avec qui il eut une petite fille. Déborah, très vite ne supportant plus son caractère entier, demanda le divorce. Il ne lui accorda jamais le « Guett », qui la libérerait. Son opposition acerbe contre les talmudistes avait pour origine son appartenance aux karaïtes. Pour eux, seule comptait la loi écrite, malgré parfois sa dureté, et non la loi orale « (c) Sarah Kranz des pharisiens qui prônait l’assouplissement des commandements divins.
Sa vengeance envers les talmudistes fut terrible, il envoya au Pape Grégoire des extraits du Talmud, en 1236, qui selon lui, faisaient état de blasphèmes envers le christianisme, notamment la remise en cause de la virg inité de Marie et de l’incarnation divine du Christ.
En 1238, Nicolas Donin se rend à Rome et remet au pape 35 articles du Talmud comme blasphématoires.
Sa vengeance, n’étant pas assouvie, il a fomenté un crime « rituel » sur un nouveau né, perpétué, selon lui par les juifs de son ancienne communauté.
Pour preuve de la culpabilité des juifs, était inscrit sur le linceul du nouveau-né, des lettres hébraïques : Yona («traité des Pères»).
En réalité, cet enfant mort-né, fut acheté à une jeune prostituée chrétienne dans le but de porter atteinte à la communauté juive. Cette accusation de meurtre « rituel » accompagna le peuple juif dans toute l’Europe pendant des siècles et persiste encore de nos jours et contribua à alimenter un antisémitisme violent du peuple juif déjà accusé de déicide.
Le 3 mars 1240, le roi Louis IX fait saisir tous les exemplaires du Talmud, sauf un caché, de la communauté, pendant que les juifs se trouvaient à la synagogue, entraînant un pogrom.
Le 12 juin 1240, le roi Louis IX ordonna une« disputation » entre quatre Rabbins les plus éminents, dont le Rabbin Yehiel, face à Nicolas DONIN qui était accompagné de !’Archevêque et de l’Evêque de Paris, de l’inquisiteur et d’un chanGelier d’Université. Les Rabbins ont argumenté en vain contre les accusations de blasphème et de l’immoralité du Talmud. La Commission Royale conclut que le livre devait être brûlé, ce qui fut fait en juin 1242, sur la place de Grève à Paris, où 24 charrettes remplies de rouleaux de la Thora furent portées au feu.
Le 9 mai 1244, le nouveau pape Innocent IV, émet une Bulle de condamnation du Talmud et exhorte à brûler toutes les copies de ce livre dans toute l’Europe.
A la suite de la « disputation », le Rabbin Yehiel fut condamné à la pendaison, mais comme on le sait, Yehiel de Paris réussit à partir pour la Terre sainte, accompagné de trois cents disciples ; il fonda à Acco (Saint Jean d’Accre) la célèbre yechiva «des Sages de Paris ».
Un jeûne a été institué la veille de Chabbat parachat ‘Houkat, pour commémorer la tragédie du brûlement du Talmud, ce qui permet de mesurer la gravité de cet épisode pour l’Histoire des Juifs de
Paris.
Nicolas Donin, intervint, aussi, dans la persécution des juifs français (3000 morts et 500 conversions) notamment en Bretagne, Poitou et Anjou.
Le zèle de ces néophytes chrétiens, pour se faire accepter, ne manquera pas d’alimenter l’accusation envers les juifs et leur littérature et ce fut, l’un d’entre eux qui convainc Louis IX de rétablir l’usage de la rouelle.
Nicolas DONIN décéda en 1263.
A travers ce récit on découvre avec stupeur ce que des mensonges, de fausses allégations peuvent provoquer comme catastrophes physiques, spirituelles, morales, matérielles … On reste effaré par les conséquences inimaginables de cette haine fondée sur des délires d’une gravité extrême et qui provoque des dommages irréversibles marquant un tournant dans l’histoire d’une nation On comprend pourquoi le Judaïsme insiste tant sur les dangers de la diffusion de fausses informations, de fausses nouvelles, sur les dangers de la médisance.